Et elles passaient si loin de vous, ces heures de songe, heures de profondeurs mystiques et sensuelles, qui fondaient en tendresses les caillots les plus amers de la douleur, heures de bonheur complet, qui abolissait le temps et le monde entier, longue gorgée aux sources de l' Oubli! Et je vous revoyais, Manuelita, ensuite: qui veilliez pâle et lontaine: vous, âme simple, fermée dans vos armes simples.
(...) Mais à présent, si vous le pouvez, sachez: je devais rester fidèle à mon destin; c' était une âme inquiète, celle dont je me souvenais toujours quand je sortais m' asseoir sur les bancs de la place déserte, sous les nuées en fuite. Elle était ce par quoi seul le rêve m' était doux. Elle était ce par quoi j'oubliais votre petit corps dangereux, tout adorable de sveltesse et de force. Et pourtant, je vous jure, Manuelita, je vous aimais, je vous aime et je vous aimerai toujours plus qu'aucune autre femme... des deux mondes.
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Campana, Dino. Chants Orphiques. Paris: Éditions Allia, 2006, pp 86-87 (Traduit de l' italien et préfacé par David Bosc).
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