domingo, 13 de setembro de 2020


Un moine décrépit, dans l' heure tardive, se traîne dans la pénombre de l'autel, silencieux dans son froc velu, et prie les prières de quatre-vingts ans d'amour. Dehors le couchant se trouble. Lointaines, des raies menaçantes de fer pésent sur les monts alentour. Le rêve est à son terme et l'âme, soudainement seule, cherche un appui, une foi dans l'heure triste. Au loin, on voit lentement sombrer les vigies mystiques et guerrières des châteaux du Casentino. Alentour, un grand silence, un grand vide dans la lumière fausse de froides lueurs qui vacillent sous les étreintes de la pénombre. Et la mémoire court encore vers les nobles dames aux bras blancs, à leurs balcons, lá-bas: comme dans un rêve: comme dans un rêve de chevalerie!
   Je sors: le parvis est désert. Je m'assois sur le muret. Des figures errent, des feux errent et s' éteignent: les moines prennent congé des pèlerins. Une haleine continue et légère souffle de la forêt vers le haut, mais on n' entend ni le bruissement de la masse obscure, ni son flux à travers les cavernes. Une cloche de la petite église franciscaine tinte dans la tristesse du cloître: et elle semble pleurer dans l' ombre, pleurer le jour qui se meurt.
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  Campana. Dino. Chants Orphiques. Paris: Éditions Allia, 2006, pp 60-61 (Traduit de l'italien et préfacé par David Bosc).
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