sábado, 22 de junho de 2019


               Houligan


La crotte des saules dans les prés,
Les balais de la plui la nettoient.
Rechache, vent, tes jonchées de feuilles,
Je suis un houligan comme toi.

Et j'aime que les fourrés épais,
Ausse lourds que les boeufs dans leur marche,
Souillent jusqu'aux genoux les hauts troncs
En râlant du ventre et du feuillage.

Le voilà bien, tout mon troupeux roux!
Qui mieux que moi pouvait le chanter?
Je vois des traces de pas humains
Que le crépuscule vient licher.

Ma Russir, ô ma Russie de bois!
Je suis ton seul héraut, ton seul chantre,
Et mes vers tristes comme des bêtes
Sont nourris de réséda, de menthe.

Fais luire, ô nuit, la cruche de lune,
Qu'un lait de bouleaux y coule enfin!
Avec ses bras en croix le cimetière
Semble vouloir étrangler quelqu'un.

L'effroi noire rôde sur les collines,
Versant au jardin un air brigand.
Mais pur bandit je le suis moi-même,
Et voleur de chevaux par le sang.

Qui n`a vu bouillonner dans la nuit
Une troupe d`ardents merisiers?
Cela m`irait, dans la steppe bleue,
D`être avec un gourdin, embusqué.

Ah, ma tête-buisson s`est fanée,
Dans la geôle chantante on m`enterre;
Au bagne des sentiments il faut
Faire tourner le meule des vers.

Mais ne crains rien pour mes chants, vent fou,
Recrache les feuilles calmement:
Malgré ce sobriquet de "poète",
Comme toi je reste un houligan.
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( 1920)
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 Essénine, Serguei. L' Homme noir. Belval: Les Éditions Circé, 2005, pp 129-131 (Choix, présentation et traduction de Henri Abril).
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Sergeï Essenine